Marseille , Jean-Claude Izzo
Je pris par la Corniche. Juste pour avoir la baie de Marseille plein les yeux, et la suivre ainsi qu’une guirlande de Noël. J’avais besoin de me convaincre que cela existait. De me convaincre aussi que Marseille est un destin. Le mien. Celui de tous ceux qui y habitent, qui n’en partent plus. Ce n’était pas une question d’histoire ou de traditions, de géographie ou de racines, de mémoire ou de croyances. Non, c’était ainsi. Simplement.
On était d’ici, comme si tout était joué d’avance. Et parce que, malgré tout, nous ne sommes pas sûrs que ce n’est pas pire ailleurs.
Extrait du livre
"Chourmo"
J’avais tourné la tête et laissé mon regard filer vers l’horizon. Là où la mer devient plus sombre. Plus épaisse. Je m’étais dit que la solution à toutes les contradictions de l’existence était là, dans cette mer. Ma Méditerranée. Et je m’étais vu me fondre en elle. Me dissoudre, et résoudre, enfin, tout ce que je n’avais jamais résolu dans ma vie, et que je ne résoudrai jamais.
Extrait du livre
"Solea"
Du ciel à la mer, ce n’était qu’une infinie variété de bleus. Pour le touriste, celui qui vient du Nord, de l’Est ou de l’Ouest, le bleu est toujours bleu. Ce n’est qu’après, pour peu qu’on prenne la peine de regarder le ciel, la mer, de caresser des yeux le paysage, que l’on découvre les bleus gris, les bleus noir, et les bleus outre-mer, les bleus poivre, les bleus lavande. Ou les bleus aubergine des soirs d’orage. Les bleus vert de houle. Les bleus cuivre de coucher de soleil, la veille de mistral. Ou ce bleu si pâle qu’il en devient blanc. Extrait du livre "Chourmo" |