Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
graindecel
graindecel
Publicité
Archives
Newsletter
22 janvier 2011

A René Char

Je me suis replongée dans la lecture de l'Anthologie du poème arabe moderne
et suite à ma visite chez Eva, je veux vous faire découvrir ce poème du  tunisien MANSOUR GUISSOUMA.

A René Char
"Je marche, mes guides sont les lettres et les signes"

Grand_trou_bleu

(photo de Thami Benkirane)

J'ai vu en rêve que nous étions en train de voler,
Traverser les mers, les montagnes et les nuages en pleine canicule,
Nous réfugier sous un palmier qui narguait le ciel,
Dans son ombre dormait la princesse du jour et de la nuit,
L'ayant aperçue, j'ai vu que nous nous changions,
En papillons sur ses cils,
Pour nous poser sur ses paupières, sur ses lèvres verdoyantes
Pour tant humer son nectar abondant,
Comme si le temps n'existait plus,
Et la vie nous rejetait aux temps perdus
Pour nous apprendre de nouveau à marcher, à voyager,
Et à maudire le destin
Et la rive de l'âge,
Comme si nous étions l'eau et les rigoles,
Faisant revenir aux plantes l'éclat de la beauté.

Il me semblait tendre la main
Devancer les soleils dans les miroirs,
Parcourir l'horizon,
Abriter dans mon ombre les gens,
Bénissant mon apparition
Et le monde des visions secrètes.
Comme si nous revenions là où flottait le drapeau des éclairs,
Et flamboyaient les mers, les pieds et les cimes des montagnes,
Il me semblait voir l'ange sourire,
Revenir de son terrible voyage,
Que nous étions l'été et l'automne,
L'existence et le néant,
Voir dans les ténèbres infinies les poètes brûler de désir,
Comme des fleurs somnolant à l'embranchement des chemins,
pour séduire les cavaliers,
Dont le convoi disparaissait à l'horizon,
Et réveiller les mouettes
Par-dessus les vagues douces comme de la soie.

Je me voyais errer
Dans les vallées où Sindbad s'était égaré,
Et dans les labyrinthes du temps où il était prisonnier,
Comme si parmi les autres prisonniers mon regard se libérait
Pour surveiller le croissant
En fin de mois, et m'abriter sous le pavillon;
Comme si nous étions l'existence et le néant.

Poème traduit par l'auteur, in Le poème arabe moderne,Abdul Kader El Janabi, éditions Maisonneuve et Larose, 1999.

yeux__miroir

(Photo de Thami Benkirane)

Publicité
Publicité
Commentaires
F
Une petite fille qui a bien grandi :-)
T
Tu nous emmènes dans un merveilleux voyage, je vole aussi avec plaisir dans ce décor surréaliste.<br /> Deux belles photos (Réalisées avec talent par notre ami Thami) accompagnent en harmonie ce poème.<br /> Le regard de cette petite fille ne m'est pas inconnu...<br /> Bises & bon dimanche!
D
On a raison de découvrir les poètes arabes, ils nous apportent le rêve dans notre société si matérialiste, et je te remercie pour le choix de ces deux photos magnifiques.
E
Que c'est beau, que c'est beau...<br /> Quand j'ai découvert Federico Garcia Lorca, je croyais que rien de plus beau n'était possible... Depuis que je découvre avec toi la poésie arabe, je nage dans le bonheur...<br /> (j'avais déjà vu la première photo, mais jamais la deuxième, et ces deux photos-là sont vraiment faites pour ce texte éblouissant et tendre...)<br /> Merci à vous deux qui croisez vos talents, par l'image et la littérature...<br /> J'espère que tu nous donneras encore de cette eau vive...
Publicité